Misfire

23/03/21 - 30/04/22 - Théâtre des expositions-
Group Show



Commissariat / Curated by : Vincent Enjalbert, commssaire associé à la filière / associate curator to the programme, avec / with Glenn Espinoza, Yanma Fofana, Charline Gdalia, Jean-Baptiste Georjon, Clarisse Marguerite et Caroline Rambaud, étudiant.e.s de la filière / students of the programme « Artistes & Métiers de l’exposition ».

Artistes / Artists : Geneviève-Charlotte d’Andréis, Atelier Populaire, Antony Béraud, Valentin Bonnet, Jean-Louis Brian, Gwendal Coulon, Honoré Daumier, Gabriel Day, Clément Erhardy, Andreas F, Jef Geys, Lisa Lavigne, Corentin Leber/, Adrien van Melle, Pierre Mérigot, Juliette Peres, Loïs Szymczak, Sophie Torrell et / and anonymes.




︎ ABAX, 2022.
Avec Jusqu’à la rupture (2019) ; Flèche (2021) ; Peuple, pouvoir et profits (2021) et La mort et la vie des automates (2021).
Matériaux divers, 175x300x100cm.


À mi-chemin entre une sand table, dispositif de planification de stratégies militaires et une sandbox, environnement malléable aux paramètres variables, le paysage artificiel qu’imagine Corentin Le- ber réunit plusieurs œuvres qui, bien que créées dans des contextes différents, trouvent dans cette exposition une articulation séman- tique inédite.

Puisant dans un vocabulaire iconographique associé à la chute et la décroissance, cette mise en scène semble dessiner une histoire sociale de l’échec, qui comme l’a démontré le chercheur Scott A. Sandage, est profondément lié à l’imaginaire de la faillite économique forgé au cours au XIXe siècle au moment du dévelop- pement du capitalisme entrepreneurial. Reprenant le titre d’un ouvrage éponyme de l’économiste Joseph E. Stiglitz, la sculpture Peuple, Pouvoir, Profits traduit sous la forme d’une courbe ascendante et destructrice la quête effrénée de richesses sur laquelle se fonde l’idéologie néolibérale.

En rendant perceptibles selon différents points de vue les conséquences de ce système à l’origine des obsolescences tech- nologiques (La mort et la vie des automates) et des dérèglements écologiques (Jusqu’à la rupture), l’installation ABAX révèle les dysfonctionnements d’une tactique socio-économique qui semble vouée à l’échec.

Vincent Enjalbert .



L’exposition Misfire accueille des œuvres qui explorent le poten- tiel esthétique, émotionnel et subversif de l’échec, intentionnel ou involontaire, tant au niveau de leur processus créatif que de leur réception critique. Bien que l’expérience de l’échec occupe une place centrale dans le parcours académique et professionnel des artistes formé·es aux Beaux-Arts, ses traces se révèlent discrètes dans l’histoire d’une école qui fut marquée, tant dans son système de concours que dans son décor architectural, par l’exaltation des réussites de ses « grands maîtres ».

Oscillant entre les émotions négatives qui lui sont tradition- nellement associées et les récupérations politiques qui peuvent en émaner, sa nature ambivalente nous incite pourtant à recons- idérer son impact autant sur la matérialité des œuvres que sur la psychologie de leurs auteur·rices. Déployées au sein d’un espace scénique pensé comme instable, les expérimentations menées par les artistes réuni·es dans cette exposition investissent à différentes échelles les « poétiques de l’échec »* : ratages techniques, foirades répétées, sabotages individuel et mutuel, amateurisme feint, acte de désœuvrement politique, détournement d’œuvres inachevées ou abandonnées par leurs auteur·rices, parasitage des dispositifs d’évaluation et de légitimation de valeur artistique...

Ces gestes indisciplinés dessinent ainsi de multiples straté- gies contre-productives qui mettent en déroute les discours, normes et représentations sociales autour de la virtuosité et de la reconnais- sance institutionnelle des artistes. Témoins d’échecs autant éprouvés et dissimulés qu’assumés et sublimés, ces œuvres interrogent les injonctions à la réussite, à l’efficacité et à l’attractivité constantes entretenues par nos sociétés ultra concurrentielles dans lesquelles plus aucune impasse ne semble possible.


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